lundi 21 avril 2014

Sur cette plage en asie, en écartant les jambes elle a rapproché les cultures (Partie 1)


J'étais en Chine depuis 6 mois. Échange universitaire. J'avais 22ans. J'étais arrivé avec l'idée de vivre une année studieuse à apprendre la langue locale mais j'avais très vite compris que la réalité serait toute autre. Nous, les étudiants étrangers, vivions une année parenthèse hors du temps où tous nos soucis étaient restés loin, en occident.
4 heures de cours par semaine et un pouvoir d'achat qui nous permettaient de vivre comme des rois avec 300€ par mois, il n'en fallait pas plus pour faire de nous la jeunesse dorée d'Asie.
D'ailleurs tous les étudiants étrangers étaient regroupés a part sur le campus, dans un bâtiment a l'écart avec interdiction de se mêler aux autres dortoirs.

Si nous étions une source de menace pour l'université c'est que nos professeurs craignaient (à raison) qu'au contact des étudiants Taïwanais nous ne perturbions la tranquillité de leur enseignement. Les  "foreigners" écoutent la musique fort, boivent beaucoup, conduisent bourrés et surtout les mâles baisent sans relâche les chinoises.

Ce qu'il faut bien comprendre  c'est qu'à 15mn en scooter de là où je dormais, les locaux n'avaient que très rarement vu des occidentaux de leurs propres yeux et les physiques caucasiens font rêver.
Inutile de rajouter que mes yeux verts n'arrangeaient pas les choses.
J'étais une célébrité.  Plusieurs fois pendant la même journée, des groupes de jeunes inconnues m'arrêtaient pour me prendre en photo avec leur téléphone portable en me prenant au bras, en me baladant dans la rues. Les sourires timides et les rires étouffes des groupes d'étudiantes  m'accompagnaient partout.

Je bossais à l'accueil d'une des plus grande boite de nuit locale. C'était un peu hôtesse d'accueil de luxe, comme job. Pas encore Escort.
L'idée c'était d'accueillir les clients les groupes de clients importants et d'aller s'assoir avec eux. La plupart ne parlaient pas anglais mais ils étaient juste contents d'avoir un occidental à leur table.



En général il me suffisait de décapsuler une bouteille de bière avec les dents pour provoquer l'hilarité de la table et recevoir applaudissements et congratulations.

Je me sentais spécial, exotique. Il m'a fallu du temps pour réaliser que j'étais plutôt une sorte de singe de foire débile.
Mais là n'était pas la question. Bête de cirque ou non, j'étais au top. En plus d'être le centre de l'attention, je plaisais. Je plaisais plus que toutes les autres années de ma vie.





Et puis j'ai vu quelque chose de magnifique qui dansait sur la piste.
Jeune, visage doux, presque enfantin.

Elle était grande pour une asiatique, très fine avec de magnifiques petits seins bombés que sa robe noire légère laissait apparaitre. La fin de la robe sur ses cuisses était tellement courte qu'on la fixait pour apercevoir son string quand son déhanché amenait le tissu à remonter. (SPOILER : elle porte un string)
Elle était nerveuse depuis qu'elle avait vu que je la regardais. Elle m'a sourit à moi et rien qu'à moi. Dans mon code personnel de la séduction ça veut dire go.

Alors je l'ai fixée des yeux en souriant, j'ai fait un rictus calculé (yeux à peine plissés, léger froncement de sourcil et commissure droite des lèvres qui se relève) et j'ai marché vers elle.


...




jeudi 17 avril 2014

You are the one among many



J'espère que tout le monde est bien conscient qu'on ne fait pas ça pour baiser.
On baise bien sûr. Plus que vous probablement. Mais ce n'est pas ce qu'on recherche fondamentalement.


On veut que vous ayez besoin de nous. On veut entendre que votre monde s'écroulera sinon. On veut faire croire à un monde de conte de fées qu'on ne pourra jamais vous offrir.
Et ça durera tant que l'illusion durera. Et puis ensuite on essayera de faire couler la relation en vous persuadant que c'est de votre faute.

Pour les présentations, ça ressemblera à ça.
Je suis Loup d'intérieur. Je suis bon le premier soir. Je ne sais pas entretenir une amitié. Je bois de la Ketel1. Je ne prends du plaisir que si vous en prenez, et tant que vous ne serez pas redevables, je continuerai.


En bon abominable connard manipulateur, je suis un bon conteur.

Je vais vous raconter la quête du temps du bonheur.

Quand l'utopie devient réalité et que deux personnes entreprennent de changer le visage de leurs vies pour occuper le territoire de l’amour.



Et tout ça reste une illusion.
Mais vous l'aviez déjà compris, pas vrai ?



samedi 8 mars 2014

Regrets éternels





"Ecoutes VK... je sais pas comment te dire ça... Ta Comm est mourante."
Le Panda a choisi d'aller droit au but, et c'était sans doute la meilleure chose à faire, mais en frontal, comme ça, on n'est jamais prêt. Ma voix déraille un peu :


"Q... quoi?"


J'ai pas eu de nouvelles d'elle depuis des mois. Depuis qu'elle m'avait demandé d'être là, et que j'ai pas voulu faire l'effort d'être là autrement qu'en pote, ce qui ne lui avait pas convenu.


"Elle est en soins palliatifs. Elle a été réopérée mais la tumeur n'a pas disparu, et a fini par grossir à nouveau. Il ne lui reste plus beaucoup de temps en fait."


J'ai l'impression qu'on vient de m'enfoncer à des lieues sous terre. Je ne sais pas même quoi répondre. Le souffle, les mots me manquent. Ça ne peut même pas être vrai : elle a 25 ans. On ne meurt pas à 25 ans.


Je tâche de rassembler mes esprits :


"Je... Faudrait que je passe la voir, que je..."


Il m'interrompt :


"Non. Tu ne vas pas la voir."


"Quoi? Mais pourquoi?"


"Parce qu'elle ne comprend pas ce qui lui arrive. les médecins disent que c'est peut-être à cause de la tumeur, parce qu'elle appuie sur son cerveau, mais elle ne se rend pas compte qu'elle va mourir. Elle n'arrête pas de demander quand est-ce qu'ils vont l'opérer à nouveau. Elle ne parvient pas à réaliser. Et c'est mieux comme ça."


Je ne trouve à nouveau rien à répondre. Mon bagou est clairement aux abonnés absents sur ce coup-là.


"Le problème, c'est que du coup, tout un tas de personnes qu'elle n'a pas vu depuis des années défile à son chevet, et que petit à petit, ça risque de lui faire comprendre. Et je n'ai pas envie que ta visite soit la goutte d'eau."


J'arrive toujours pas à reprendre mon souffle. Je repense à ma dernière discussion avec elle, un soir, au téléphone, des mois auparavant. Elle n'allait pas bien. Moralement. J'ai essayé de la secouer, je lui ai dit des mots très durs. Je lui ai dit que je ne la reconnaissais pas, que c'était une battante par nature, qu'elle devait retrouver cet état d'esprit, et que tout allait bien se passer. Elle m'avait répondu : "Mais tu comprends pas que j'ai juste peur de mourir?!"


De la merde. J'avais une fille pour qui j'avais une immense affection en train de me confesser sa terreur face à une putain d'injustice, et la meilleure réponse que j'aie trouvée est une succession de lieux communs tous plus pathétiques les uns que les autres.


Et je ne lui ai plus parlé, depuis.


Et mon ami, là, son ami, est en train de m'expliquer qu'elle va mourir. Imminemment.


J'arrive à peine à articuler quelques mots :
"Tu te rends compte de ce que tu me demandes?"


"Oui. mais si ça peut l'aider à partir en paix, c'est la meilleure chose à faire."


Son argumentaire tient la route. Je ne pense pas qu'il ait foncièrement tort. Mais c'est très difficile pour moi d'accepter qu'il ait raison.


"J'ai besoin de réfléchir."


Je raccroche, et je m'effondre un peu. Je m'en veux comme jamais je ne m'en suis voulu de toute ma vie. J'ai plein de trucs qui me transpercent l'esprit, cette dernière putain de conversation, où je me suis montré si dur. Elle va partir en croyant que je n'avais aucune espèce d'amour pour elle. Voire pire.
Je m'en veux de l'avoir quittée. J'ai beau savoir que sur le moment, c'était le mieux à faire, que j'avais de bien meilleures raisons de le faire que le simple fait de voir d'autres filles, qu'elle avait cherché à être trop envahissante dans ma vie et que c'était exactement ce qu'il ne fallait pas faire avec moi, je m'en veux putain. A deux jours près. A deux jours près, je ne l'aurais pas quittée. Parce que je ne l'aurais pas quittée malade, je me serais bien trop méprisé après ça. Je l'aurais accompagnée, pas pour moi, mais pour elle. Peut-être même qu'elle s'est sentie abandonnée, et qu'elle a baissé les bras à cause de ça. On dit que le moral est excessivement important dans la lutte contre le cancer. Peut-être que d'une certaine manière c'est moi qui l'ai tuée. Peut-être que j'aurais pu l'aider, juste par mon soutien, et qu'elle ne serait pas en soins palliatifs à ne pas réaliser qu'elle attend la mort à cet instant. J'aurais pu être un mec bien. J'ai été à l'apogée du connard, et une personne que j'aime va mourir, et j'ai le sentiment d'y être un peu pour quelque chose.


Vous devez vous dire que je dis de la merde. Mais la culpabilité est une pute vachement intrusive.


Je me connecte sur ce putain de blog, et poste un message en annonçant la clôture. Un article au vitriol, un article violent contre moi, parce qu'à ce moment-là, j'ai qu'une envie, c'est m'éclater la tronche contre un mur, mais je suis trop lâche, ou trop douillet, pour le faire.


Je passe une semaine dans un état second. Une semaine qui file à une vitesse incroyable, à me demander chaque jour si je dois y aller ou pas.


Le Panda m'appelle.


"C'est fini. On l'incinère dans deux jours."


Encore une fois, je prends la nouvelle de plein fouet. Pas déjà putain, j'ai même pas pu décider de la meilleure marche à suivre ! Et puis, elle a 25 ans, y a une erreur, c'est pas possible.
Ta gueule, et bim, voilà, la vie, c'est ça.


Je zappe l'anniversaire de PDM, je lui fais croire qu'elle est morte 2 jours plus tard, pour pas lui pourrir son anniversaire.


Je suis un putain de fantôme à l'inhumation. Mon pote intériorise à mort, je m'écroule pour deux. Il aura finalement encore plus de mal à se remettre que moi. Je suis au fond du trou pendant une semaine, à passer mon temps à chialer au travail, ce qui ne sert strictement à rien. La vie peine les mois suivants à reprendre son cours. Et puis, je rencontre The Girl.


Aujourd'hui encore, presque 6 ans plus tard, on a beaucoup de mal, le Panda et moi, à se voir sans parler d'elle. Sa disparition pèse sur notre relation, et même si on continue à être là l'un pour l'autre, quelque chose ne sera plus jamais comme avant. Parce qu'une partie de moi s'en voudra toujours de l'avoir écouté. Même s'il a fait ce que j'aurais fait à sa place. Parce qu'on a eu à affronter ensemble la profonde injustice de la vie, c'est peut-être naïf de notre part, mais on a réalisé toute sa cruauté seulement à ce moment-là. Et parce que du coup, on a perdu pas mal de nos illusions côte à côte, et que ça a, peut-être, un peu, sali notre relation, même s'il reste un de mes tout meilleurs amis.


Marie est morte à 25 ans. Elle n'a avait commencé à vivre qu'à 20 ans. Elle faisait partie, tout comme moi, des gens que les autres ignoraient quand nous nous sommes connus, au collège/lycée. Elle était devenue une femme géniale qui s'était admirablement remis du décès de son père, épanouie dans sa vie aussi bien personnelle que professionnelle, avec des projets, un avenir, des envies qu'elle n'aurait eu aucun mal à réaliser.


En août 2008, tout, absolument tout, lui a été enlevé.


Et d'un point de vue purement égoïste, elle est partie en pensant que je ne l'aimais pas, et je pense que je ne m'en remettrai pas, que je ne triompherai pas de cette culpabilité, avant encore longtemps.