Mercredi 13 février, donc.
Je sors d'une rude journée de cours, j'ai pas énormément dormi pour cause de "j'ai fini le taf fort tard la veille au soir". Il est 17 heures. L'avancée discrète de l'été nous offre chaque jour quelques minutes de soleil en plus, et la nuit ne menace pas encore Aix de sa chape sombre, et je pointe le nez hors de la fac et je décide de rentrer en passant par le parc Jourdan.
Je l'aime ce parc Jourdan. C'est ici que moi et mon premier Amour avons échangé notre premier baiser, voilà une éternité, 6 avril 2001, j'en reviens pas ce que j'ai changé depuis.
On a convenu avec Ma Comm que le soir-même elle venait manger à la maison, que je lui concoctais un délicieux repas, et qu'après on s'envoyait salement en l'air comme y a guère qu'avec elle que je le fasse.
Putain de Parc Jourdan, on sent que la Saint-Valentin approche, des couples fleurissent ici et là un peu comme les tapis de pâquerettes qu'on trouve alentour. J'ai du Morcheeba dans les oreilles, je marche en respirant profondément, un large sourire accroché aux lèvres, je savoure. Putain, que j'aime cette ville. Même avec ses Fashion-victims, ses tektonic, ses cagoles, ses punk-à-chien, ses méga-rebelles de 18 ans tout juste qui fument plus de pets qu'ils n'ont de pensées dans la journée, ses vieux cons, sa mafia, je la prends toute entière, cette ville, elle est mienne maintenant.
Je descends le long des escaliers menant à la fontaine plane, jusqu'au portail qui donne non loin de l'hôtel du Roy René. J'arrive sur le périph, je survis une nouvelle fois à sa traversée, passe le Cézanne, puis le Mazarin, me voilà à l'entrée du cours, avec Béchard sur ma droite. Si je veux trouver des provisions sans prendre la voiture, ni aller au Casino à l'autre bout de la ville, le seul endroit potable, c'est le Monoprix. SPAR et l'armée de petits casinos, je pourrais, mais je vais devoir me prostituer devant l'échoppe afin de récolter les 350€ que me couteraient le cas échéant mes courses.
Je me mets donc en route vers le "Citymarket" qui me connait depuis maintenant plusieurs années et je descends au sous-sol pour prendre de quoi faire un festin de roi qui ferait à Ma Comm la démonstration qu'elle ignorait un de mes talents, si culinaire soit-il.
Je commence mes emplettes, je trouv assez vite tout ce que je veux, j'ai une idée précise de ce que je veux faire et je sais que je vais être assez fier de moi.
Au détour d'un rayon, mon lecteur MP4 décide qu'il est temps de faire une pose, et me met une vieille musique d'un jeu vidéo dans les oreilles, j'aime bien, mais j'ai pas envie de l'écouter à ce moment. Je pose mon panier, cherche mon lecteur dans ma poche intérieure, j'ai comme une envie de Laurent Voulzy. Une fille arrive sur ma droite. Je délaisse une seconde le titre affiché sur l'écran à cristaux liquides pour l'effleurer du regard, cette nouvelle venue.
Beurette, 22-23 ans, grande, fine, comme j'aime, de grands yeux verts, une bouche charnue, un bandana dans les cheveux, un peu bobo, merveilleuse. Mon regard se fixe dans le sien, et elle m'offre un somptueux sourire qui me laisse voir une rangée de dents parfaitement alignées. Elle passe devant moi, nos yeux restent accrochés, mon regard la suit, elle n'arrête pas d'avancer, mais tourne la tête vers moi au fur et à mesure de sa progression au sein du rayon. Je lui lance un sourire craquant (de niveau 6) et repose les yeux sur mon lecteur pour passer la chanson.
Le temps de m'extasier sur le romantisme inhérent à une rencontre au sein d'un rayon de monoprix, et je décide de me reconcentrer sur le motif de ma présence ici.
On se recroise une fois, puis deux, puis trois. En continuant de plus belle nos petits jeux de regards. Je file à la caisse. J'ai quelques scrupules à craquer sur une fille en préparant une soirée avec ma copine officielle.
Elle s'installe quelques caisses plus loin. Je la remarque, mais fais mine d'être concentré sur mon lecteur audio. Je mets mes articles sur le tapis, nouvel échange de regards, long, très long, il pue le sexe ce regard...
"Vous préparez un dîner en amoureux?"
Un grand merci à la caissière de Monoprix qui me replonge avec violence dans la réalité.
Je souris.
"Ça se voit tant que ça?"
Foie gras, soupe de châtaignes, carpaccio, hampe, sauce aux morilles, glace miel et nougat, soit les conditions de vie étudiantes se sont considérablement améliorées, soit notre caissière a le flair d'un Derrick enrhumé.
"Elle a de la chance votre copine !! J'espère que mon mari il aura le même genre d'idées !!"
Ma pauvre fille. T'as peut-être même pas mon âge et t'es déjà mariée.
"Si j'ai ce genre d'idées, c'est peut-être justement parce que c'est ma copine, pas ma femme"
Je souris en brisant ses rêves de mariage heureux, puis m'achemine vers l'escalator. Je lance un ultime coup d'oeil à Miss Monoprix 2008, qui n'en a pas fini avec sa caissière, et me fixe avec un immense sourire aux lèvres. Je pose un pied sur la marche de l'escalator et me laisse lentement acheminer vers le rez-de-chaussée et la sortie, mes yeux toujours dans les siens. Elle voit bien que je joue. Peu à peu, le mécanisme va me faire disparaître de son champ de vision, on le sait tous les deux, et juste avant que cela ne se fasse, j'articule très clairement sans un bruit "à un de ces jours...", un début de sourire carnassier aux lèvres. Je disparais, plutôt content de mon effet.
Ceux qui auront suivi se souviendront d'une lithographie de Marilyn Monroe que m'a offerte Ma Comm il y a peu. Je tente de passer à Point cadre, rue des Cordeliers, mais les bougres étant en congé, je dus alors me résoudre à laisser Marilyn à nu quelques jours de plus. Demi-tour, je remonte en direction de chez-moi, et au coin d'une rue, je manque de heurter une fille. Je lève les yeux. Merde. C'est elle.
Je suis pris de court. Autant je me sentais être parti en vainqueur du Monoprix, autant là, je m'y attendais pas. Elle n'a pas pu me suivre, j'ai quitté le monop il y a déjà un quart d'heure. Je souris, cherchant un truc à dire.
"J'ai pas l'habitude de croiser aussi souvent un mec aussi mignon en si peu de temps par hasard..."
Putain, elle a une voix un peu dure, suave, calme, et je trouve toujours rien à dire. Elle tire un fluo de ma pochette de cours, prend celle-ci, et note en gros son numéro dessus (genre en diagonale, sur toute la longueur de la pochette).
Je récupère ma pochette, et souris à nouveau.
"Merci..."
Je ne la quitte pas des yeux.
Elle s'approche de moi pour me faire la bise, m'embrasse au coin des lèvres et me murmure à l'oreille : "Je m'appelle Miss Monoprix 2008..."
Elle reprends sa place initiale, attendant vraisemblablement mon prénom.
"A bientôt, alors Miss Monoprix 2008..."
Elle me sourit, et elle se barre.
Je me suis fait bouffer. Une horreur.
Hier j'ai passé ma soirée avec Ma Comm. Une super bonne soirée. Parfaite même, bonne chair bon contact des chairs, beaucoup de jeux, de la tendresse, tout.
Pourtant, ce matin en cours, je pensais à l'autre, son putain de numéro marqué en gros sur ma pochette. Je me suis bouffé les couilles toute la journée pour ne pas l'appeler.
J'ai des scrupules aussi à brancher une meuf le jour de la Saint Valentin aussi faut croire.
Je vais essayer de me retenir.
Mais je sens comme un salaud qui trépigne au fond de moi.
4 commentaires:
Mais non tu vas pas faire de bêtises. Ta Ta Comm et c'est Ta Comm. T'as réussi à ne pas faire de bêtises avec Pute Rousse donc ça ne va pas être dur à côté... (et puis si ça se trouve c'est une ptite pouf comme la fille aux raisins alors...)
Sinon peux-tu m'expliquer ce besoin d'aller voir ailleurs MEME quand on a une copine aussi bien que Ta Comm???
Miss Gavroche, c'est un salaud c'est tout...
Blague à part VK je l'ai eu en live mais le récit est plus chouette ici. et paf la caissière !
Ahhh ça oui le Monop' nous ruinera...c'est normal d'en avoir pour presque 15 euros avec un bout de viande et juste 2-3 trucs en plus pour manger ?! NON!
Monop = supermarché pour bobo, par contre le Monoprix Gourmet c'est super bon !
à quand une relève du pouvoir d'achat...
mdr pour le "sourire carnassier", je crois que cela colle parfaitement à ta séduction compulsive...mais je comprends...je suis un peu pareille. :|
Mais je pense que le meilleur, c'est d'en rester là, on est jeunes c'est normal de séduire et d'en jouer...c'est vrai pourquoi s'en priver ?? c'est toujours bon pour l'ego!
Cependant un point d'honneur à toute cette comédie: à force de trop chercher à séduire et surtout conclure, on peut faire beaucoup de mal...autour mais aussi à soi-même.
Après tout baiser des filles toujours différentes qu'est-ce que ça apporte ? Tu dois être mieux placé que moi pour savoir qu'on apprend plus et qu'on prend plus de plaisir dans une relation "longue durée", Duracell, où on apprend à connaitre l'autre et à toujours explorer un peu plus la sexualité...parce que les filles d'un soir, c'est peut-être booon, mais au final je pense pas que les plans Q d'un soir nous fassent prendre notre pied plus que ça...
En tous cas tu as l'air d'avoir du succès :)
@miss gavroche : Ben j'ai un mal fou avec les concepts de monogamie, de possessivité et de fidélité. Personne n'est à moi, je ne suis à personne. Tout le monde aime plaire. et être attiré par quelqu'un. L'Amour, tout ça... J'ai une opinion très distrayante de l'Amour. Je vous la développerai, un de ces jours. Grosso modo, pourquoi est-ce que l'amour a ce statut sacré, sans preuve de son existence tangible. Y a-t-il une échelle graduelle pour les sentiments? Non. L'appartenance, c'est malsain. Le couple, c'est l'esclavage moderne selon cette notion d'appartenance.
Cela dit, Ma Comm est au top.
@Marion : Je t'avais dit que je me lançais dans une heure de joute narrative :P
@fake_rouquine : argument recevable, le sexe est potentiellement techniquement meilleur avec une partenaire de durée (d'où mes histoires d'amour "Kleenex" peut-être) mais le désir décroit dans le même temps, faut être honnête, je dois à peine connaître un couple sur 100 qui garde une vraie flamme passé un an. Le plaisir de la conquête, lui renforce forcément le plaisir de la partie de jambes en l'air. Et puis honnêtement, la baise, c'est pas ce que je préfère en général.
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